Pour Biathlon Live, Frédéric Jean est longuement revenu sur ses quatre dernières années passées à la tête de l’équipe de France féminine et sur ce qui l’attend dans son nouveau rôle de consultant sur la chaîne l’Équipe.
Après quatre hivers à coacher l’équipe de France A féminine, Frédéric Jean passe de l’autre côté du micro. En effet, le Drômois fait partie du dispositif de la chaîne l’Équipe pour cette saison. Accompagné de Tanguy Le Seviller, il commentera les courses du circuit IBU Cup à partir de mardi prochain. “Fred” Jean a bien voulu revenir pour nous sur ses quatre dernières années ainsi que sur son nouveau défi qui l’attend prochainement.
Bonjour Frédéric, vous allez attaquer cette saison dans un tout nouveau rôle, celui de consultant. Impatient de découvrir le biathlon sous un nouvel angle ?
Hyper impatient ! J’ai vraiment autant hâte que quand j’étais coach. Ça va permettre de continuer de parler de ma passion qu’est le biathlon et de continuer à faire vibrer des gens à travers la télé. Le fait de pouvoir vivre le biathlon de l’autre côté, je suis impatient de voir cela car je pense qu’il y a beaucoup de choses que je vais voir, que je ne voyais pas spécialement avant.
En mars dernier, vous avez décidé de quitter le navire bleu après quatre saisons passées à la tête de l’équipe de France féminine. Quelles étaient les raisons de ce départ ?
La raison numéro un c’était la famille. Je suis parti du principe qu’avec cette équipe je me suis investi totalement. En faisant ça, on laisse sa famille de côté. J’ai deux enfants en bas âge, un garçon qui a sept ans et une petite fille de deux ans. Ça devenait compliqué pour ma femme de gérer ça toute seule étant donné que j’étais énormément absent.
J’estimais aussi, qu’après avoir passé quatre années avec des athlètes, même six à huit saisons pour certaines, je trouvais que c’était bien pour elles d’avoir un nouveau discours et que ça pouvait relancer d’une certaine manière leur carrière. Quand je leur ai annoncé que j’arrêtais, il y en a qui étaient un peu déçues, je le comprends, moi le premier. Ça m’a très attristé d’arrêter parce que j’adorais mon job. Avec les filles on avait créé des liens, on a vécu des choses fortes au cours de toutes ces saisons. Mais je savais pertinemment que si je continuais, j’allais laisser ma famille sur le carreau.
Je n’ai eu aucune lassitude, j’adorais ce que je faisais, je suis un passionné de biathlon et je suis très content de pouvoir rester dans le milieu d’une autre manière.
Il n’a pas manqué grand-chose pour qu’au niveau collectif on soit la meilleure nation mondiale.
Frédéric Jean
Vous êtes-vous fait un bilan personnel sur ces quatre années ?
Suite à la première année qui s’était moyennement, voire, difficilement passée, il y a eu une grosse remise en question de ma part parce que j’avais vraiment envie d’accompagner ce groupe-là jusqu’aux Jeux Olympiques. Une grosse remise en question du coach, des méthodes d’entraînement pour que l’équipe rebondisse le plus vite possible. Sur les trois saisons qui ont suivi on a fait que monter dans les tours gentiment et pour qu’au final, sans prétention, qu’on est la saison dernière une équipe qui fasse partie des meilleures nations mondiales. On était capable de jouer le podium tous les week-ends. Il n’a pas manqué grand-chose pour qu’au niveau collectif on soit la meilleure nation mondiale.
Je suis passé par toutes les émotions. À certains moments, il y a eu des énormes flops où j’ai été touché et triste. J’ai aussi vécu des émotions, je ne veux pas exagérer, mais qui sont égales à la naissance de mes enfants. Pendant ces quatre années, j’ai considéré les filles comme mes propres enfants, des fois peut-être même un peu trop. À toujours vouloir les aider, à aller dans le bon sens alors que des fois j’aurais du visser un peu plus. Mais je n’ai aucun regret. Ça a été quatre fantastiques années, même si la première a été difficile, il a fallu se battre pour aller chercher une petite poignée de podiums. J’ai eu la chance de vivre des émotions comme je pense dans peu de métier on peut les vivre.
J’ai aussi vécu des émotions, je ne veux pas exagérer, mais qui sont égales à la naissance de mes enfants.
Frédéric Jean
À titre personnel, je n’ai aucun regret. Sportivement, le seul regret que j’ai c’est qu’on ne soit jamais arrivé en quatre ans, avec la force collective qu’on avait, à décrocher un titre ou une médaille sur un grand évènement (en relais). Ça c’est quelque chose dans mon bilan qui m’a fortement chagriné.
Vous avez donc passé la main à Cyril Burdet, nouveau coach du groupe féminin…
J’ai vraiment hâte de voir les filles à l’œuvre. Je suis impatient de voir les modifications que le nouveau coach (Cyril Burdet) a pu apporter, que ce soit au niveau technique et mental. J’ai envie de voir le fonctionnement de la nouvelle équipe, avec Nanass (Anaïs Bescond) qui arrête et Justine (Braisaz-Bouchet) qui est en pause. Je suis certain que ça va changer beaucoup de choses au sein de l’équipe et j’ai hâte de voir comment les filles vont réagir suite à ces changements.
Mais cet hiver vous serez encore dans le paysage du biathlon puisque vous devenez consultant pour la chaîne l’Équipe. Comment êtes-vous passé de l’autre côté du micro ?
Ça s’est fait naturellement. Au printemps, Maël Seror (Rédacteur en chef adjoint sur la chaîne l’Équipe) m’a contacté pour me proposer de devenir consultant, c’est-à-dire, parler de la discipline, apporter son expertise comme le font déjà actuellement d’anciens biathlètes. Très rapidement ensuite, Alexis (Bœuf) avait demandé à passer plus de temps chez lui, et donc faire moins d’étapes de Coupe du Monde aux commentaires. La chaîne m’a donc convoqué au mois de juin pour faire des tests, pour commenter des courses à blanc. Ça s’est très bien passé. Ça m’a plu, j’ai adoré ça.
Ça fait 25 ans que le biathlon anime ma vie. Je l’aurais vraiment mal vécu de passer à autre chose.
Frédéric Jean
Avez-vous tout de suite été motivé par ce nouveau projet ?
Je reste un réel fan de biathlon. J’ai œuvré pour cette discipline pendant douze ans en tant que coach, quatorze ans avant en étant biathlète. Ça fait 25 ans que le biathlon anime ma vie. Je l’aurais vraiment mal vécu de passer à autre chose, ça aurait été impossible, je ne l’aurais pas accepté. C’est donc une super opportunité qui me permet de rester dans le biathlon, de continuer à côtoyer mes anciens collègues de travail, mes anciens athlètes. Tout ça en partant beaucoup moins de la maison. J’espère que ça se passera bien parce que c’est quelque chose que j’ai vraiment envie de continuer à faire.
Et à l’inverse des autres consultants qui sont d’anciens biathlètes, vous aurez un œil d’ancien coach sur les courses…
J’en ai toujours parlé dans le cadre du travail, au niveau des entraîneurs, j’ai toujours trouvé dommage qu’on soit capable de former des coachs et au final d’en perdre parce qu’il y en a qui partent à l’étranger, d’autres qui préfèrent faire autre chose. Je trouve ça juste dommage d’avoir des gens qui se sont donnés à 300% pour cette discipline qui derrière rentrent chez eux avec tout ça dans leurs valises et n’en font pas profiter les gens. Il y a beaucoup de choses que je vais pouvoir raconter et j’espère que ça plaira. Et je vais retrouver un système de travail en « binôme » et ça c’est quelque chose qui me plaisait.
Vous serez aux commentaires de l’IBU Cup cet hiver avec Tanguy Le Seviller. Que peut-on attendre des Bleus sur ce circuit ?
On a affaire à une équipe qui est relativement jeune. Je pense que beaucoup d’athlètes vont y aller pour prendre de l’expérience, mais ils ont gagné leur place, sportivement ils ont donc le niveau. Il faut qu’ils continuent leur apprentissage mais Ils n’ont aucune limite à se fixer. Les garçons comme les filles peuvent faire de supers résultats. Après, le général IBU Cup n’est pas forcément représentatif avec les athlètes qui montent et qui descendent. Un athlète peut finir dixième au classement mais parce qu’il n’a couru que quelques courses et qu’à chaque fois qu’il était présent, il a fait de grandes performances.
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Crédit photo : Kevin Voigt