Tout juste sacrée championne du Monde Juniors de l’individuel, Camille Bened a eu la gentillesse de livrer ses premières impressions pour Biathlon Live.
Félicitations Camille ! On avait la sensation que tu avais coché cet individuel. Est-ce le cas ?
Pas forcément parce que je suis arrivée aux Mondiaux avec l’envie de repartir avec une médaille. Je n’avais pas coché de course en particulier. L’individuel c’est un format qui me correspondait beaucoup. Mais ça fait quelque temps qu’il me fuit, que j’ai du mal à concrétiser les choses. Il y a deux ans je suis championne d’Europe de l’individuel, mais depuis j’avais du mal à concrétiser les choses sur ces individuels. Ça m’arrivait plusieurs fois d’arriver à 15/15 et de laisser partir les choses.
C’était particulier aujourd’hui, car je suis partie, je n’étais pas du tout confiante et pendant ma course j’étais sereine. Je suis passée d’un état à un autre. Hier j’ai eu quelques petits soucis avec ma cara qui m’ont fait paniquer, car on est aux Championnats du Monde, donc les émotions sont décuplées.
Ce matin j’ai mis vraiment longtemps à me régler, j’ai utilisé 50 balles. Dans la tête d’un athlète quand les réglages ne se passent pas forcément très bien, ça ne met pas forcément en confiance, mais une fois que j’avais pris le départ j’étais sereine sur ce que je faisais. Je savais ce que j’avais à faire, ce que je devais mettre en place et les choses se sont déroulées les unes après les autres. Sans jamais avoir à réfléchir sur ce qui va se passer si je fais ci, si je fais ça. Je pense que c’était aussi l’avantage de partir tout devant, car au final je n’ai pas été « polluée » par les résultats des autres, par « qu’est-ce qu’elle fait elle », « qu’est ce qu’elle a pu faire » , « où est-ce que je ressors », « comment je suis » … Et j’ai pu rester du coup dans ma course du début à la fin.
Des courses comme ça, des courses « parfaites », on sait très bien qu’on n’en fait pas 10 000 dans une carrière.
Camille Bened
Justement, qu’est-ce que ça t’inspire d’avoir produit un aussi beau biathlon aujourd’hui avec une maîtrise parfaite de la course, un bon temps de ski, un bon tir cadencé, le 20/20 ?
Des courses comme ça, des courses « parfaites », on sait très bien qu’on n’en fait pas 10 000 dans une carrière. On ne peut pas faire chaque course parfaitement. J’ai envie d’en profiter d’avoir sorti cette belle course le jour où il le fallait et forcément ça donne envie d’en refaire d’autres et d’essayer de retrouver la même manière sur les prochaines courses.
C’est ton premier titre mondial individuel après des titres en relais, quelles sont les sensations ? Est-ce différent ?
C’est différent car ça vient aboutir un investissement personnel, c’est quand même une grosse récompense. Ça vient récompenser tout le travail qu’un athlète a pu mettre en place pendant l’année, pendant les années précédentes. C’est sûr que les médailles en relais j’adore, c’est quelque chose qui est particulier, car on le partage à plusieurs. On n’est pas toute seule, on peut le partager avec les copines. Mais d’être médaillée en individuel, personnellement, c’est encore plus beau, car ça vient récompenser tout le travail. En relais une fois qu’on a fait notre course on n’est plus maître de ce qui se passe par la suite, ou si on part en dernière, on n’est pas maître de savoir à quelle place on va partir.
Là, si on fait la bonne course, c’est tout l’investissement qu’on met ces derniers temps qui va être récompensé. Ça donne envie de continuer, c’est vraiment quelque chose qui motive, qui donne envie d’avancer et de continuer à aller vers le plus haut niveau.
Est-ce que tu peux nous en dire plus au niveau des conditions de tir et de ski. Hier la piste s’est pas mal dégradée au fil des dossards, tu as eu cette sensation ?
Je suis partie tout devant donc ça ne s’est pas trop dégradé, mais en parlant avec les copines, Paula (Botet) avait l’air de dire que sur ses trois premiers tours ça allait plutôt bien et que sur la fin ça se dégradait. Les skis étaient moins bons car la neige a commencé à réchauffer. Pour ce qui est des conditions de vent depuis qu’on est là, il n’y a pas une brique de vent. C’est vraiment très calme donc des conditions parfaites pour faire du biathlon. Il fait beau, la neige reste quand même assez compacte même si ça réchauffe, ça ne fait pas de la soupe donc non c’est vraiment bien.
Actuellement vous en êtes à quatre médailles en quatre courses, vous vous êtes concertés pour une telle razzia ?
Non pas du tout (rires) ! Je pense que les coachs n’imaginaient pas non plus faire un aussi bon début de Mondiaux. Ça fait vraiment plaisir de voir qu’il y a un bon collectif, il y en a qui ne sont pas loin des médailles. Chez les jeunes il y en a deux qui sont aux portes des fleurs, les autres ont des très bons temps de ski. Nous aujourd’hui c’est pareil, il y a Paula (Botet) qui fait les fleurs, Sophie (Chauveau) qui a un très bon temps de ski, Eve (Bouvard) qui a aussi un bon temps de ski. Donc on voit qu’on a quand même une grosse équipe de France et qu’on a moyen d’aller chercher encore de belles choses sur la suite de la compétition.
Justement, pour la suite de ses Mondiaux, quels sont tes objectifs ? Il y a une certaine forme de libération après avoir obtenu un titre ?
Oui exactement, c’est vraiment un soulagement d’avoir fait la médaille aujourd’hui, car j’avais vraiment cet objectif de venir faire une médaille en individuel. Maintenant c’est fait, je peux me concentrer sur les courses qu’il reste, sans avoir trop de pression et y aller en essayant de faire le meilleur biathlon que je peux.
Découvrir la Coupe du Monde d’ici un an ou deux
Camille Bened
Un titre aux Mondiaux, un podium en IBU Cup cette année, est ce que tu sens que tu as vraiment franchi un cap ?
Oui, je pense que petit à petit je commence à franchir un cap. Enfin, je ne sais pas si j’ai vraiment « franchi » un cap, mais ça avance. Ce que j’aimerais, c’est pouvoir découvrir la Coupe du Monde d’ici un an ou deux. Commencer à découvrir l’étage du dessus. Après, comme me disent mes coachs, j’ai le temps, je n’ai que 20 ans. Après c’est compliqué, on a toujours envie d’avancer et d’accélérer. Mais il faut prendre le temps de faire les choses, de faire de belles choses sur les étages d’en dessous.
Crédit photo : IBU/Bjorn Reichert