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Fabrizio Curtaz : « Toute cette polémique est presque positive »

Dans une interview pour Fondoitalia, le directeur technique de l’équipe italienne a voulu calmer le jeu après les propos tenus par Lisa Vittozzi à l’encontre de Dorothea Wierer.

On parle beaucoup de l’interview de Lisa Vittozzi, perçue comme une accusation à l’encontre de Dorothea Wierer. Êtes-vous surpris ?

« Personnellement, je savais déjà ce que Lisa ressentait au fond d’elle, elle a raconté ce qu’elle a vécu à ce moment pendant les championnats du Monde d’Ostersund. Rien de bien surprenant pour moi, mais je comprends l’étonnement de ceux qui n’ont pas vécu la situation comme nous de l’intérieur. Honnêtement, je n’ai perçu aucune accusation contre Dorothea dans l’interview, Lisa a raconté ce qu’elle a vécu et ce qui l’a marqué à la fin de la préparation et la fin de saison passée« .

L’interview ressemblait pourtant à une accusation envers Wierer pour ce qui s’est passé à Ostersund l’année dernière.

« Elle n’a accusé personne, ni Doro ni personne d’autre, mais a seulement raconté ce qu’elle a vécu personnellement et l’a marqué dans sa préparation. Elle n’a pas accusé Dorothea, à tel point que ces jours-ci, elles ont parlé et chacune a donné son opinion. Toutes deux ont été déçues. Lisa ne pensait pas qu’elle allait déclencher quelque chose d’une telle ampleur, en revanche Doro ne s’attendait pas à une telle polémique à un moment aussi délicat, aussi parce qu’elle ne savait rien de ce que pensait Lisa« .

Selon Vittozzi, Wierer aurait dû courir ce jour-là et elle s’est probablement sentie pénalisée par le choix de sa coéquipière.

« Vous savez, Lisa a sûrement dû avoir ce sentiment, qu’elle a surmonté avec le temps, elle ne l’a fait que lorsqu’elle a réalisé qu’elle ne pouvait plus travailler tranquillement, parce qu’elle voulait toujours montrer quelque chose de plus et ne pouvait pas être elle-même. Lisa ne porte pas d’accusation, elle a simplement raconté comment elle a vécu ce moment et comment cela l’a affectée. Maintenant, elle s’en est sortie et a compris beaucoup de choses, même en parlant avec l’encadrement technique« .

Pensez-vous que Lisa Vittozzi fait confiance au personnel technique italien ?

« Il faudrait le lui demander, mais de mon point de vue oui, sinon elle ne nous aurait pas parlé de tout cela déjà au printemps dernier« .

Êtes-vous toujours convaincu que la bonne décision a été prise ce jour-là à Ostersund ?

« Les techniciens ont bien choisi parce que la santé des athlètes est la principale préoccupation. Nous avons ici un médecin qui évalue l’état de santé des athlètes, qu’ils aient ou non une chance de courir. Nous ne laissons pas un athlète qui n’est pas capable de courir, comme Doro ce jour-là. Je ne peux pas entrer dans les détails privés, mais ce jour-là, elle a été suivie par le médecin de l’équipe et c’est ainsi qu’elle a pris sa décision« .

Cependant, Lisa était là avec vous. Alors pourquoi l’avez-vous perçu différemment ?

« Elle voulait probablement que Doro court. Elle était consciente qu’ensemble, elles auraient de grandes chances d’amener le relais à un bon résultat. Mais Lisa est athlète, pas médecin, elle n’a donc pas pu évaluer l’état de santé de sa coéquipière. Nous avions essayé de rétablir Dorothea jusqu’au dernier moment, le matin nous l’avions emmenée pour une séance de stimulation musculaire et voir comment elle réagissait. Nous avons tout fait, mais je n’ai pas besoin de donner d’autres explications, si ce n’est de souligner que Wierer voulait participer à la course et qu’elle était déçue de ne pas pouvoir le faire. Mais vous vous en souvenez le lendemain lors de la mass-start ? Elle a remporté l’or parce qu’elle était fantastique au tir, mais à ski, elle n’a tourné qu’à 70 % de réussite. C’est exactement la raison pour laquelle Doro est désolée de tout ce qui est dit« .

Pensez-vous que quelqu’un ait pu influencer de l’extérieur l’idée que Lisa se faisait de ce qui s’est passé ?

« Malheureusement, c’est la situation actuelle. Parfois, autour des athlètes, il y a des gens qui aiment alimenter ces polémiques. Je ne comprends pas cet intérêt, ils aiment créer des déséquilibres là où l’équilibre règne. Honnêtement, je ne comprends pas pourquoi, mais il y a des gens qui aiment créer ces situations. Ceux qui l’ont fait n’ont certainement pas réalisé qu’ils faisaient du mal à l’athlète elle-même, à tel point que seule Lisa a perdu dans toute cette affaire« .

Si elles se situaient entre la 30ème et la 60ème place, nous n’en aurions pas parlé.

Comment les deux athlètes ont réagi ?

« Ce qui s’est passé les a sûrement dérangé toutes les deux. Elles sont humaines, quand certaines choses sont dites, déformées ou gonflées, c’est très ennuyeux. Mais nous sommes ici pour donner le bon sens aux choses. Si elles se situaient entre la 30ème et la 60ème place, nous n’en aurions pas parlé. Étant deux des biathlètes parmi les plus fortes du monde, nous devons tenir compte de cela. Dans notre pays, nous aimons créer des rivalités qui sont plus grandes qu’elles ne le sont en réalité. En fait, vous voyez ce que je veux dire ? Toute cette polémique est presque positive ».

Pourquoi ?

« Peut-être que ce qui s’est passé met un peu de piment, qui, dosé de la bonne façon, pourrait être positif pour l’équipe. »

Les deux athlètes se sont-elles parlées ?

« Lisa a expliqué comment s’est déroulée l’interview. Je ne suis pas là pour dire au public ce qui se dit au sein de l’équipe. Quoi qu’il en soit, elles sont dans la même chambre et ont tout le temps d’en parler. Ce qui s’est passé nous a ennuyé. Nous devons en tirer les leçons, car à mesure que l’attention se porte sur notre sport, nous devons l’accepter aussi« .

Si l’on regarde le côté positif, c’est la conséquence d’un biathlon qui bénéficie de plus en plus de place et de considération parmi les médias.

« Oui, allez, disons-le comme ça. En Italie nous aimons ces polémiques, dans notre pays nous nous intéressons plus aux ragots qu’aux gestes sportifs des athlètes. Nous devions faire cette expérience ici aussi« .

On en parle beaucoup sur les réseaux sociaux aussi.

« Je ne savais pas, je n’ai pas de profil sur les réseaux sociaux« .

Comment est l’ambiance dans l’équipe maintenant ?

« Super, parce que nous avons travaillé dur et de la meilleure manière. Tous les athlètes vont bien et nous avons trouvé des conditions parfaites pour l’entraînement que nous avions prévu. Ce sont ces choses qui comptent, pas le reste. Demain, nous terminons notre rassemblement, puis l’aventure va commencer« .

Interview Fondoitalia

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Crédit photo : LENNY photography