Un de nos éditeurs de Biathlon Live a eu la chance de discuter avec Martin Fourcade en visioconférence vendredi dernier dans le cadre « des rencontres avec des sportifs de légende » organisées par le journal L’Équipe. Récit d’un échange pas comme les autres.
Le coup de fil surprise.
Quelle ne fut pas ma surprise lorsque je décrocha mon téléphone mardi après midi dernier. De l’autre côté de la ligne, Adrian du journal l’Équipe, qui m’annonçait que j’avais remporté le concours afin de rencontrer Martin Fourcade dans le cadre « des rencontres avec des sportifs de légende ». Étant plus que disponible en ce moment pour les raisons que nous connaissons tous, je confirmais ma participation et le rendez-vous avec Martin était pris pour le vendredi 14 avril à 14h15 !
Fou de joie à l’idée de rencontrer celui qui berce ma passion pour le biathlon depuis près de 10 ans, je me lançais dans la préparation de quelques questions avec mes collègues de Biathlon Live sans oublier de vérifier quinze fois la qualité de ma connexion internet et l’accessibilité à l’application « Zoom », support de visioconférence pour l’occasion. Bien sûr, je n’allais pas être seul (six abonnés en tout), mais cela suffisait amplement à mon bonheur à venir.
Martin débarque sur mon écran !
Le grand jour arrive, je suis un des premiers connectés. Nous sommes tous accueillis par Valentin, responsable du service évènements abonnés qui nous explique comment l’échange allait se dérouler. Nouvel arrivant dans le salon visio, Marc Ventouillac, spécialiste du biathlon pour le journal l’Équipe, nous salue et nous explique qu’il sera l’animateur de ce visio et qu’il nous donnera la parole à tour de rôle pour poser des questions à Martin sur des thématiques qu’il évoquera.
Le grand moment approche mais avant de voir le catalan pointé le bout de son nez, un dernier mot d’accueil nous est donné par Jérôme Cazadieu, directeur de la rédaction de l’Équipe, quand soudain une nouvelle personne apparait sur l’écran… Martin Fourcade « himself » ! Après quelques difficultés de connexion pour le catalan dans le jardin de sa maison, dans son Vercors d’adoption, l’échange pouvait commencer.
Questionné par le patron.
Nous devions tous nous présenter à tour de rôle et évoquer notre passion pour le biathlon et pour le quintuple champion olympique bien évidemment. Mon tour vint en deuxième et lorsque je finis d’évoquer mon plaidoyer pour le biathlon et Martin, le catalan repris immédiatement la parole pour me poser une question à son tour ! Petite goutte sur le front… J’avais placé derrière moi le mug officiel « Biathlon Live », bien visible à l’écran et Martin me demanda « quel est donc cet objet que tu as placé innocemment derrière toi ? ».
Je décidais de jouer le jeu en faisant le surpris, ce qui provoqua l’hilarité de toute l’audience. Il embraya « Tu es le responsable de ce site que je connais ? » Je lui répondis que non en lui expliquant ma participation depuis un an à cette petite entreprise, l’occasion d’évoquer également sa page fan « Martin Fourcade Live ». L’échange s’arrêta ici pour le moment, mais l’instant fût bien sympathique et riche en enseignement… le patron connaît notre site !
La surprise de cristal du catalan.
Après que tout le monde se soit présenté, Martin nous réserva une petite surprise. Le matin même il venait de recevoir par courrier un sacré colis… son globe de cristal du sprint ! Pris par la tournure des évènements en Finlande et donc l’arrêt anticipé de la saison, l’IBU n’avait pas pu remettre les globes de cristal aux différents vainqueurs et le catalan venait donc de recevoir le sien. L’occasion pour nous donc de découvrir cette magnifique surprise et de lui offrir à notre tour un cadeau avec une visio-ovation collective.
Les questions s’enchaînent tout d’abord sur son avant carrière avec les difficultés qu’il a pu rencontrer, comme il l’a notamment évoqué dans son livre. Son deuxième ouvrage est d’ailleurs toujours en cours d’élaboration et il nous a confié qu’il sera totalement différent du premier. Ce sera davantage un journal de bord de sa dernière saison. Le temps de changer d’emplacement dans son jardin pour ne pas réveiller ses filles qui font la sieste, il est temps d’évoquer son immense carrière.
Adversaires, carrière, déceptions, émotions, dopage…
Ses plus grands adversaires (principalement norvégiens), son coup de mou de la saison 2018/2019 (qu’il ne comprend toujours pas vraiment), sa dernière saison en zig zag au niveau de la forme mais pleine d’émotions avec les Mondiaux notamment. Le dossier dopage est également évoqué (plus sur son rapport à cette pratique que sur les affaires en cours). Je ne rentre pas dans le détail pour des raisons de confidentialité auprès de l’Équipe mais vous pourrez trouver les meilleurs moments en vidéo de cette conférence sur le site internet du média sportif.
Pour ma part, je reviens sur un épisode moins connu de sa carrière et son envie de disputer des étapes de la Coupe du Monde de ski de fond lors de la saison 2014/2015. Frappé par une mononucléose lors de sa préparation d’avant saison, il n’avait pas pu doubler les disciplines comme il l’imaginait, s’arrêtant à deux courses en fond dans sa carrière. L’occasion de lui demander si cela lui laissait des regrets ? Réponse de l’intéressé : « Un petit peu mais mon niveau a ensuite décliné sur le fond et l’arrivée de Johannes m’a permis de me surpasser dans cette discipline (le fond) pour rivaliser avec lui ».
Un champion sincère et tourné vers l’avenir.
Quasiment 45 minutes déjà d’échange avec le septuple vainqueur du général et le moment de constater que tout le monde était très à l’aise dans cet échange un peu particulier. Martin est tel qu’on le voit dans les médias. Naturel, il prend vraiment le temps de répondre aux questions de chacun et de développer ses réponses. On ne sent pas de distance par rapport à son statut et ses réponses peuvent aussi être fermes mais sans jamais se montrer irrespectueuses.
L’heure était maintenant venue d’évoquer sa retraite sportive. Très heureux de sa nouvelle vie, même si avec le confinement ces premières semaines sont un peu spéciales, il a été interrogé sur ses projets (commission des athlètes du CIO, comité d’organisation des JO de Paris 2024). Il continuera à suivre le biathlon mais à distance par rapport à l’équipe de France. Il ne se voit pas intégrer le staff. Il a côtoyé de très grands entraineurs mais ne voue pas de réelle passion pour ce métier comme son frère Simon (qui entraîne les jeunes au sein des bleus).
La retraite… mais un come back ?
Les choses de la vie, un palmarès assez rempli à son goût par rapport à ses objectifs de carrière et une dernière saison qui l’a vu renaître et vivre des derniers moments de joie avec ses coéquipiers l’ont convaincu d’arrêter. Même s’il a toujours en lui cette petite flamme qui l’a accompagné tout au long de sa carrière et l’a poussé à se sublimer sur chaque course, c’est bel et bien fini. La rencontre allait bientôt se terminer mais je ne pouvais pas m’empêcher de lui poser une nouvelle question pleine de malice en rapport avec sa retraite…
« Que pensez-vous des come-back des sportifs professionnels retraités ? ». C’est avec le sourire mais de manière assez ferme que Martin me donna la réponse que tout le monde attendait : « Ces come-backs ont parfois réussi, d’autres non, il est donc difficile de donner une réponse ferme sur ce sujet. Pour ma part, un retour voudrait dire que j’ai pris une mauvaise décision il y a un mois et ça je ne l’envisage pas ».
Ultime question sur le biathlon et son avenir climatique.
Au moins j’aurais essayé ! Plus que cinq minutes et Marc Ventouillac me donne l’occasion de poser une ultime question au Patron. Je m’exécute en lui demandant ce qu’il pensait de la crainte de voir l’univers du biathlon se détériorer à cause du réchauffement climatique avec des neiges de mauvaise qualité, transportés par camion par manque d’enneigement. Un constat qu’avait fait Célia Aymonier lorsqu’elle a aussi annoncé sa retraite.
Très sensible à la cause écologique, même si son sport ne lui permet pas d’être irréprochable, Martin n’est pas spécialement inquiet et pense que le biathlon a de belles années devant lui. Il a également tenu à souligner que ce que l’on reprochait au biathlon (transport de neige en camion notamment) était un procès facile fait à son sport et que bien d’autres disciplines pratiquaient ce genre de méthode.
Au revoir Martin et merci pour tout !
Le glas a sonné. La conférence va se terminer mais avant de nous quitter, Martin a tenu à nous remercier pour ce moment d’échange et nous a également incité à poursuivre nos encouragements envers l’équipe de France et que même sans lui ce sport continuerait à être formidable. Un dernier merci adressé au catalan, une capture d’écran en guise de photo collective, et son écran repassait au noir, comme celui de Marc Ventouillac.
L’heure et demi s’était déroulée à la vitesse lumière mais c’est avec le sourire aux lèvres et une sensation d’avoir vécu un moment magique que nous avons effectué un debriefing avec Valentin de l’Équipe pour partager nos impressions et le remercier également (ainsi qu’Adrian) pour ce moment qu’il avait organisé. Ce moment restera gravé dans ma mémoire et j’espère vous l’avoir fait partagé du mieux que je pouvais. Merci à vous et merci Martin !
Crédit photo : Twitter l’Équipe